Post Laval Virtual 2021 – des pistes, une pandémie, des réflexions

Après un été de réflexion et une bonne dose de procrastination … je prends un peu de temps et de recul pour réfléchir aux échanges qui se sont déroulés sur le salon Laval Virtual. Cette année, au sein de RA’pro, nous avons enregistré un compte rendu, forcement subjectif, des éléments qui nous ont marqué sur les stands. Vous le retrouverez au début de l’article. Je vais donc plutôt me concentrer sur les réflexions qui proviennent des échanges dans les conférences professionnelles « VRticals », c’est à dire plutôt destinées à explorer des secteurs particuliers : le sport/fitness, l’industrie, l’éducation, la santé et la tourisme/patrimoine.

Tout d’abords, pour avoir un idée de l’ambience de Laval Virtual 2021 et des nouveautés / découvertes que les membres de RA’pro y ont fait. Voici la vidéo de « débriefing » :

Le 13h de la RA – 20 juillet 2021 – Spécial Laval Virtual 2021

Dans le cadres des conférences, VRticals en physique et TransVRsal dans le Laval Virtual World, nous avons abordé de nombreuses questions sur les utilisations des technologies immersives (XR). Vous pouvez retrouver les interventions sur la page Youtube de Laval Virtual. Voici une courte sélection de réflexions (encore une fois subjective) avec quelques tentatives d’illustrations en RA et en RV.

Quelle a été le rôle de la pandémie dans la diffusion des technologies immersives ?

Amelia’s Secret de XD Productions

2020 a été une année tragique. Sur le plan économique de nombreuses entreprises de la XR ont souffert, certaines ont disparu. Le confinement a entraîné la fermeture de nombreux espaces où des expériences de VR ou d’AR étaient présentées. Les témoignages sont assez similaires et séparent grossièrement 2020 en deux parties. Au premier semestre, tout s’est arrêté ! L’obligation « d’agir à distance » a entrainé certaines entreprises dans un processus d’adaptation de leurs produits (en particulier pour la RA). C’est par exemple à ce moment que la société XD Productions a travaillé sur son escape game en réalité augmentée « Amelia’s Secret ». Le second semestre, au contraire, a vu beaucoup de projets être lancé, en particulier quand il est devenu évident vers octobre 2020 que les situations de confinements allaient se multiplier. Comme par ailleurs un grand nombre d’utilisateurs a trouvé dans les technologies immersives (et dans le numérique en général) un moyen finalement assez agréable de poursuivre leurs activités, les propositions se sont multipliées.

Tous les secteurs n’ont pas avancé à la même vitesse. Il semble aujourd’hui assez clair que le commerce et le tourisme sont allés très vite. Il est vrai que ce sont eux qui ont immédiatement perdu leur clients « physiques ». On a donc vu de nombreuses expériences immersives destinées à garder le lien avec une marque, ou à faire venir virtuellement des gens dans des espaces expérientiels. Le monde de la musique, des arts, de la culture et du patrimoine a été particulièrement actif et, pour la majorité des intervenants sur Laval Virtual, la crise du COVID fut comme un catalyseur des usages numériques, dont la XR. De nombreux projets existaient avant mais les nouvelles contraintes ont poussé à une mise en place rapide. Je ne dirais pas que toutes les initiatives ont été heureuses (faute de préparation souvent), mais j’imagine que certaines barrières mentales ont été levées. Je ne reviens pas sur la cas particulier des salons ou, depuis un peu plus d’un an, on peut expérimenter du meilleur au pire …

La boutique virtuelle de MACHINE-A et de « the Institute of Digital Fashion » lancée pour la London Fashion Week

L’industrie n’a pas été en reste même si les mises en place ont été plus lentes, en particulier chez les plus petites entreprises. La frilosité dans l’intégration du numérique a été accru par la situation économique et les fortes incertitudes. On a donc vu, ici aussi, une confirmation de l’utilisation de la XR dans les domaines connus de l’expertise à distance et de la formation, mais sans réelle révolution des usages.

La plateforme de rééducation de Virtualis VR (source https://virtualisvr.com/)

L’évolution du secteur de la santé est pour moi assez ambivalente et les intervenants sur ce sujet ont confirmé mon sentiment. Clairement, la contrainte du confinement a fortement poussée les outils et les méthodes de traitement à distance basées sur la XR. Que ce soit pour la formation ou pour le traitement des pathologies mentales, de gros projets se sont mis en place et plusieurs dispositifs ont passé les certifications de la FDA. L’intérêt de ces outils n’est plus à démontrer, nous avons depuis quelques années de la littérature scientifique sur le sujet. Dans le même temps, il y a assez peu en Europe de « passage à l’échelle » c’est à dire d’utilisation massive de ces outils à l’hôpital par exemple et l’enseignement de l’utilisation de la VR (pour le traitement) est pratiquement inexistant. On sent bien que nous sommes dans un période charnière de transformation des pratiques. Espérons qu’elle ne durera pas trop longtemps.

Le secteur qui m’a le plus étonné est celui de l’éducation. J’ai cru naïvement que l’urgence allait faire exploser les outils de XR testés depuis des années dans le secteur, et que tous les fantastiques professeurs engagé(e)s que je côtoie dans RA’pro allaient (enfin) pouvoir développer leur actions. Le retour à la réalité a été plutôt rapide 🙂 Evidemment, il y a des initiatives particulièrement inspirantes comme le campus virtual permanent de NEOMA. Mais dans l’ensemble, on a plutôt vu une éloge de la débrouillardise pour tenter de conserver le lien avec les élèves, et des instances centrales proposant des outils numériques dignes des années 80. On tape souvent sur Microsoft et ses visions globales, mais sans « Teams » un grand nombre de classes auraient tout simplement disparu. Je ne vais pas revenir sur l’immobilisme des institutions éducatives, on pourrait en faire un roman.

Où en est la diffusion de la XR aujourd’hui (et que peut-on attendre demain) ?

Dans toutes les séries de conférences nous avons également voulu faire un point d’étape « après la crise ». Nous ne sommes pas encore revenu à une situation normale mais aujourd’hui on ne peut plus parler d’urgence. On peut donc s’interroger sur la pérennité de l’utilisation des technologies immersives. De manière globale, tous les intervenants sont d’accord sur un point : on ne reviendra pas en arrière pour la bonne et simple raison que ces outils ont permis à minima de gagner du temps et/ou de l’argent dans de multiples activités de l’entreprise. On pense évidemment au gain de temps dans les déplacements ou à la facilité d’assister/former un opérateur pour une intervention.

La solution Assist AR Lite de Teamviewer (source : https://www.teamviewer.com)

La question est aujourd’hui d’imaginer une hybridation entre les manières de faire « à l’ancienne » et les manières introduites par ces nouveaux outils. Vous me voyez venir, on parle bien de transformation numérique des entreprises puisque pour hybrider, il faut à la fois que les données soient « numériques » mais également que les processus de fonctionnement soient compatibles avec un travail distant (et parfois asynchrone). Il y a encore beaucoup de chemin à parvourir dans les PMI/PME (et dans certaines entreprises plus grandes qu’on croient avancées sur ce point).

Sans prendre beaucoup de risque on peut donc parier que les usages les plus « faciles » des technologies immersives vont continuer leur expansion : les outils de réunions et de rencontres, de formations, d’assistance à distance. Ce sont d’ailleurs eux qui sont disponibles complètement packagés par de grandes entreprises numériques (Microsoft, Teamviewer, Facebook) et qui sont disponibles à un coût marginal. Si vous êtes un prestataire plus petit de ce type de solutions, vous allez devoir mettre en avant clairement votre spécificité pour exister, même les marchés de niche vont se réduire drastiquement.

A-t-on une vision stratégique de la XR en Europe ?

La question n’a pas été posée sous cette forme lors des conférences. Nous avons plutôt constaté que les entreprises européennes utilisaient dans leur grande majorité des solutions américaines pour la XR. Ce n’est pas une grande découverte, c’est aussi le cas pour l’utilisation du numérique en général. Est-il possible de faire autrement ? Force est de constater que ce n’est pas simple, encore moins pour les PME/TPE dont nous parlions plus haut.

Le modèle RA de l’entreprise Lynx

De même pour les prestataires de XR, il est très compliqué aujourd’hui de proposer des solutions européenne sur un marché mondial. Cela n’empêche pas l’existence de véritables pépites comme les finlandais de Varjo ou les français de Lynx. Reste que ces entreprises sont assez fragiles par rapport aux acteurs principaux du marché et peuvent disparaître du jour au lendemain.

Ces technologiques sont-elles considérées comme des priorités au niveau national ou européen ? Rien ne me permet de l’affirmer. Depuis la tentative de « plan RA » en 2014 dans le cadre du programme “La Nouvelle France Industrielle”, aucune action d’envergure a été menée même si, évidemment, la BPI a soutenu plusieurs entreprises du domaine. L’Europe a également lancé des initiatives où les technologies immersives jouent des rôles majeurs comme XR4ALL et le programme Horizon Europe comporte plusieurs branches fléchées sur la XR.

Si on prend au sérieux les projections des grands cabinets de conseils ou si, plus simplement, on lit les rapports d’augmentation d’efficacité et de productivité liée aux technologies immersives, on arrive vite à la conclusion qu’elles représentent un axe de développement stratégique. L’année 2020 a encore renforcé cette conclusion en mettant l’accent sur ses utilisations dans la réinsdustrialisation des territoires (formation souple des personnes en reconversion) ou dans le secteur du tourisme. Ces deux domaines étant cruciaux pour la France on peut raisonnablement se demander pourquoi aucune action d’envergure n’est menée ?

Quelle est la place des géants du numériques sur ce marché ?

En complément de la question précédente, nous avons beaucoup parlé de Facebook durant les conférences car c’est probablement l’entreprise qui fait le plus parler d’elle dans le secteur de la XR depuis un an. Le prix de l’Oculus Quest 2, la R&D constante, la volonté de mettre en place un Metaverse, la stratégie de l’entreprise est claire. Mark Zuckerberg l’explique d’ailleurs chaque année pour le fêtes 🙂 On aurait tort évidement de se focaliser uniquement sur cette entreprise car d’autres géants américains et asiatiques travaillent d’arrache-pied pour proposer des solutions complètes. On peut citer Microsoft qui développement sa réalité mixte dans ses solutions Hololens + Dynamics 365, HTC qui complète son offre de casque avec un écosystème applicatif « VIVE Sync », ByteDance (propriétaire de TikTok) qui rachète le constructeur de casques de VR Pico, ou encore Google qui, sans faire de vague, construit également son propre écosystème autour de son cœur de revenu : la recherche.

Ces différents appétits nous force à nous interroger sur la question de la gestion des données (personnelles ou d’entreprises) et sur la gouvernance de ses grands ensembles. Les utilisateurs, pris individuellement, pèsent peu. Peut-être allons-nous voir émerger des groupes d’utilisateurs voulant maitriser un peu plus leur destin !

So what ?

Les échanges de cette édition de Laval Virtual Europe ont été particulièrement riches. Ils ne se résument pas facilement ce qu’il me semble important de retenir est l’excitation des professionnels du secteur. Tous partagent le sentiment que nous sommes à une période vraiment charnière pour l’utilisation. Non pas que ces technologies vont péricliter, elles se développeront dans les années qui viennent.  Le basculement se fera plutôt sur comment elle sont utilisées, par en aura les moyens (particuliers, petites entreprises, grands groupes) et qui fixera les règles du jeu.

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