L’industrie, l’usine et le futur à travers deux livres

J’ai pu, cet été, prendre enfin le temps de lire deux ressources intéressantes sur l’évolution de l’industrie à court terme, ou, pour utiliser des mots à la mode, l’arrivée de l’ « Usine 4.0« . Les thèmes des deux livres étant complémentaires et en lien également avec la réalité augmentée, je vous propose une courte présentation dans la suite de cet article.

Les thématiques abordées dans « L’usine du futur – Stratégies et déploiement » (Nathalie Julien, Éric Martin) et « Industry X.0 – Créer de la valeur à l’ère du digital » (Eric Schaeffer) sont proches : Il s’agit en effet de comprendre et d’utiliser l’arrivée en masse de data dans les usines pour en améliorer les performances. Les deux ouvrages sont complémentaires. Le premier a une vision très pédagogique, les auteurs travaillent à expliquer (pour ne pas dire démystifier) les termes. Ils proposent également une présentation de certaines méthodologies pour faciliter la fameuse « transition numérique » et des témoignages assez concrets de professionnels. Le second ouvrage est plus stratégique et présente des évolutions « longues » de l’industrie en général. Il est probablement plus destiné à des comités de direction qu’à des directeurs d’usine. Je ne peux pas m’empêcher d’y relever des caractéristiques symptomatiques des grands cabinets de conseils (l’auteur est directeur chez Accenture) comme un peu de novlangue tirée du monde des startups (pivot, living product et autres franglais des affaires), des schémas aux axes exotiques (mais superbes) et surtout des prédictions quantifiées à 0.1% sur 10 ans 🙂

Les points en commun 

Cela ne va pas vous surprendre mais l’industrie 4.0 est une industrie pilotée par les données, qu’elles viennent des clients, des fournisseurs, des objets connectés sur les machines ou des produits fabriqués. En conséquence, la partie informatique de l’usine devient un point stratégique et la DSI n’est pas morte mais doit se transformer 🙂 En effet, même en externalisant une partie des besoins, il est de plus en plus nécessaire de maîtriser au moins quelques aspects techniques. Cet enjeu RH semble assez peu pris en compte actuellement, d’autant plus que les profils sont des combinaisons étranges de compétences informatiques et numériques. Autre conséquence pratique, le PLM (product lifecycle management) est supplanté par le DLM (data life cycle management ou parfois noté ILM pour Information lifecycle management). Cela change à la fois l’organisation de la production et, ici aussi, les compétences nécessaires. 

source : 
Library Research Data Lifecycle (https://blogs.ntu.edu.sg/lib-datamanagement/data-lifecycle/)

Une conséquence intéressante de ce pilotage par les données est qu’il met cruellement en lumière les problèmes de leurs flux dans l’entreprise ! Techniquement, cela vient d’une absence de norme sur les formats de données, qui nécessite des outils de « traduction » complexes à mettre en place et à maintenir. En terme d’organisation, la cause est à rechercher dans les silos internes à l’entreprise. Les deux livres parlent d’un « décloisonnement » des services qu’on a un peu de mal à comprendre en pratique. En grattant dernière les mots, il semble sur la solution envisagée soit plutôt la disparition pure et simple des différents services au profit d’une organisation structurée par les flux de données.

Le pilotage par les données permet une automatisation de plus en plus grande des systèmes de production. Cette automatisation rend possible la personnalisation des produits, la hausse de rendement avec des lignes de production agiles et résilientes, et une meilleure connexion à l’écosystème. 

L’écosystème est d’ailleurs un autre point traité dans les deux ouvrages. C’est lui qui va permettre de passer d’une économie de produits à une économie de services, et donc de proposer aux clients des « packages » maximisant leur satisfaction (en théorie en tout cas).

La places des technologies immersives

Le traitement de la réalité virtuelle et de la réalité augmentée est très succinct dans  « Industry X.0 – Créer de la valeur à l’ère du digital ». L’auteur évoque ces technologies en lien avec d’autres, sans entrer dans les détails. 
« L’usine du futur – Stratégies et déploiement » par contre consacre tout un chapitre à l’usine virtuelle dont le concept de jumeau numérique est le coeur. Les technologies immersives y sont mises en situation dans plusieurs domaines, comme la conception des postes de travail, la fabrication, la formation, etc. Les exemples sont concrets et nous pouvons même y trouver une méthodologie pour se lancer dans ce concept. 

Quelques points d’étonnement

Le passage à l’industrie 4.0 est expliqué dans le deux ouvrages par les bénéfices attendus. Ils ont été listés plus haut : raccourcissement des temps, agilité, hausse de productivité, etc. La justification est souvent « vos concurrents vont le faire, donc vous devez le faire », ce qui tient plus du cercle vicieux que de l’idée de progrès global.  Sans entrer tout de suite dans des considérations éthiques, il me semble qu’on peut parfois se poser la question du « pourquoi » en même temps que le « comment ». Cela aurait le mérite de donner une vision plus positive des changements pour les personnes qui sont chargées de les mettre en place (ou de les subir).

La volonté d’automatisation et la place de l’humain dans le processus sont, il me semble, traiter d’une manière ambiguë. Les ouvrages expliquent à la fois que l’automatisation doit être la plus totale possible pour rendre la production agile et que l’humain est au centre de la transition. Evidemment, tous les auteurs insistent sur la transformation des métiers. Cependant il n’est pas incongru de penser que le passage, par exemple,  d’opérateur de chaîne de production à data manager ne va pas se passer facilement et pour tout le monde … Sauf à ce que l’éducation et la formation continue ne subissent aussi une révolution, l’employabilité risque plutôt de se rétrécir … 

Quelle est la place du développement durable dans ces ouvrages ? Elle est assez faible en pratique … On trouve la description des avantages de l’écoconception par exemple, mais l’idée de durabilité arrive souvent comme un cheveu sur la soupe, un peu après tout le reste. Elle est liée soit à une demande client (donc plutôt vue comme une opération de communication), soit à une législation contraignante. Peut-être que le « pourquoi » dont nous parlions plus haut pourrait se trouver ici 🙂

En bref …

Vous l’avez compris, j’ai bien aimé ces deux livres et je vous les conseille pour approfondir votre compréhension de la transformation actuelle de l’industrie. Suivant votre niveau de connaissance dans le domaine il me semble pertinent de commencer par  « L’usine du futur – Stratégies et déploiement » pour être à l’aise avec l’ensemble des concepts et, suivant votre besoin, continuer par  « Industry X.0 – Créer de la valeur à l’ère du digital » pour avoir une vision plus stratégique des choses. 

N’hésitez pas à partager votre propre avis sur des deux livres !

Alternative proteins explorer | AR true beliver (with facts) | Part-time Chief Metaverse Officer (#ItsAJoke)
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